Cinq contes fantastiques

Cinq contes fantastiques

Claude Ollier

Language: French

Pages: 60

ISBN: 2:00313401

Format: PDF / Kindle (mobi) / ePub


II est dans l'un et l'autre paysages à la fois, là à la même place, sans remuer. Il les sent tous les deux, les sent bien dans son corps tous les deux, tout autour de son corps, aussi loin qu'il puisse appréhender le monde. Pour une fois ! L'univers s'offre à lui dans une dualité insoupçonnée, séductrice, jusqu'à ce jour celée dans la coïncidence. L'impression est universelle. Cela dure un bon moment. La métamorphose se prolongeait, le randonneur se sentait pris au jeu et jouissait sans retenue de la faculté nouvelle à lui octroyer pour prix de sa disponibilité. De son désir d'errer, sa jouissance à s'égarer, se perdre. Est-ce là un monde ancien ? je l'aurai vu sur les gravures, songeait-il, les contes figuraient ce trouble sur les scènes lointaines où l'on jouait. Cet éclat modulé, troublant, l'intense tension de l'être et l'émerveillement. Cette splendeur dans l'herbe. Ce qui aurait pu passer au regard d'autrui pour une aimantation extraordinaire de la contrée s'est effacé d'un coup, dédoublement des lignes comme gommé d'un clin d'oeil.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

pas ou faisait-il celui qui ne le voulait pas ou n’y arrivait pas ? – la proximité étonnante des phénomènes, � intransitifs » comme il disait, qui jalonnaient son récit, avec ceux que Borodine avait observés et éprouvés, bien plus fortement certes, plus continûment ; c’était donc, en somme, le sujet même de son propre livre que Morris ne percevait pas clairement, n’avait pas perçu l’écrivant, puis le relisant, il l’avait relu plusieurs fois et ne voulait plus le relire, le livre restait dans son

trembler un peu. J’en revois les grands simulacres, les aires fastueuses de tension entre le monde et ses simulacres. Et le reporter de la Tribune allait ainsi pérorant. Si fines rayures sur le métal qu’elles n’alertent le premier regard, buée linéaire ombrant le monde de sa grisaille, ces paysages ont de l’appui, le tissu de la page régule le transfert des données, gros grains et éclaircies, orages, déluges de tropique, conforte le voyageur, comment sans cette trame naviguer dans cette poix,

milieu où je vivais maintenant était régi par une autre composition du temps, plus grave, plus ancrée dans le corps, je me suis levé… Cela n’est pas dans mon Journal, je ne tiens pas de Journal, j’ai devant les yeux quand je le veux scènes de tornade ou brasier, dans mon corps vivante violence des éléments, métamorphose. Le jour où le vent sec du sud a détruit l’oliveraie. Si Borodine ce matin-là avait franchi la zone, s’était risqué par affleurements du rocher, galets pollués et trous d’eau

d’un océan, s’étendait au-delà des limites de la vue, et le rivage, largement échancré, offrait aux dernières ondulations des vagues un sable fin doré et parsemé de petits coquillages ; les flots s’y brisaient avec ce murmure sonore particulier aux milieux clos et immenses. C’était un océan véritable, avec le contour capricieux des rivages terrestres, mais désert et d’un aspect effroyablement sauvage. Une lumière spéciale en éclairait les moindres détails, non pas la lumière du soleil ni la lueur

mine terreuse, yeux rougis ? Son accoutrement ne le soucie guère, chemise, pantalon déchirés sans doute, maculés de terre, de boue, sandales usées jusqu’à la corde, ses vêtements étaient usés déjà, fatigués, vêtements de tous les jours. Assis sur la crête encore, contemple avec étonnement la trace sur le versant abrupt de ses enjambées laborieuses, distendues à l’extrême : comment diable a-t-il pu venir à bout de l’obstacle sans basculer ni retomber tout en bas, la vue réconfortante de son

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